Nos échecs nous font-ils grandir ?


La question semble paradoxale, tant la pression de la réussite est écrasante dans le travail, à l’école, la famille, le sport, et la société. Aujourd'hui, en France, l'échec est considéré comme un signe de faiblesse, d'incompétence, voire même de désobéissance. Il ne fallait pas faire ça, ni décider ça. La peur de l'échec favorise l'immobilisme, et le respect des règles, même si elles ne sont pas pertinentes. C’est aussi un puissant générateur de culpabilité. Pourtant, il présente de nombreuses vertus. C’est la thèse que soutient Charles Pépin, philosophe et enseignant, dans son ouvrage : "Les vertus de l'échec," Allary Éditions.

  • Quelles sont donc ces vertus dont chacun pourrait profiter ?

En préambule, précisons la condition majeure pour tirer avantage d'un échec : ne pas s'identifier à lui, ne pas confondre le résultat, ce que l'on fait, avec qui l'on est. "On peut rater sans être un raté." Sans cette distance, l'échec nous réduit, nous exclut, et s'accroche à nous comme un élément de notre identité.

Plus il se présente tôt, plus nous progressons rapidement, c'est-à-dire que nous vivons des expériences qui nous font mûrir plus vite, et nous rapprochent sans attendre de notre "vrai" talent.

  • L'échec permet de comprendre. Selon Bachelard, c'est un pilier de l'esprit scientifique : "aucun savant ne parvient à la vérité sans être passé par la case erreur." J'ajouterai qu'il dévoile les règles d'un système humain (organisation, groupe, individu) quand nous proposons un conseil, une action, ou une interprétation et qu'ils ne sont ni entendus ni repris. Lorsqu'il provoque une crise, il fait jaillir ce qui est latent, caché et qui cherche à s'exprimer. L'étymologie du mot crise renvoie à l'ouverture, à la faille. Une nouvelle occasion de comprendre, de "lire ce qui était recouvert."
  • L'énergie vitale, la motivation et la persévérance sont révélées par l'échec. Il sert de mesure à la force de caractère, non seulement pour le dépasser mais pour s'en nourrir. L'échec est une connaissance intime dont on peut se servir, sur laquelle on s'appuie. Avant d'être un obstacle, il est une expérience.
  • L'échec est aussi un événement qui nous permet de nous connecter ou reconnecter au réel. Le sentiment de toute-puissance que nous éprouvons parfois, en conscience ou en l'ignorant, nous fait courir des risques. Nous pouvons nous éloigner de nous-mêmes et faire le vide dans nos relations avec les autres. Rencontrer l'échec, c'est nous remettre à la place qui est la nôtre, redevenir "humble", étymologiquement "sur la terre."
  • L'échec parle de ce qui est en nous. Si je ne parviens pas à atteindre le but fixé parce que l'obstacle m'en empêche, je peux l'entendre comme l'expression de mon désir inconscient. Comme si une force vitale me ramenait à ce que je veux vraiment. S'il se répète, c'est que je n'ai rien changé. Je suis resté dans le déni de l'énergie interne qui cherche à se montrer. Le ratage nous rapproche de ce que nous voulons vraiment, notre élan vital.
  • Il constitue aussi une opportunité pour se réinventer, faire le choix d'une autre direction. Ressenti trop souvent comme une impasse, il est en fait un carrefour. C'est le vécu négatif de l'échec qui nous replie et nous renferme, parce qu'il nous atteint dans notre être. Enfermés dans notre émotion, nous ne pouvons saisir aucune opportunité.

Pour Charles Pépin, la décision se divise en deux catégories. La première n'est qu'une suite logique, une évidence. Toutes les informations montraient déjà la direction à prendre. Il suffit de suivre le chemin. Pour la seconde, c'est moins facile. Elle se base sur l'intuition, l'engagement personnel, la nouveauté, la tentation de sortir du choix qui s'impose de lui-même. Mais pour oser, il faut "oser l'échec." Ici, la décision rejoint l'audace. C'est la capacité qu'il convient de développer. Comment ? En s'appuyant sur des héros. Qu'ils soient sportifs, artistes, entrepreneurs, ils ont connu l'échec et l'ont transformé en expérience, en ressource, plutôt qu'en honte.

Ces "vertus de l'échec" font du bien. Elles constituent un encouragement à oser. Le pire à vivre, c'est sans doute d'échouer à n’avoir rien tenté.


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